par Monique et Alain BONNEMAYRE , Suzanne BARTHE
Une fort intéressante découverte à NANT (Aveyron) : le cahier des délibérations, datant de 1646, de la CONFRERIE des MENUISIERS !!!
Récemment, suite au décès [1] de Suzon Besson demeurant Rue Droite, [2] . Sabine, héritière, et son mari Yvan Bouat , ont retrouvé, dans sa maison, coincés derrière une armoire, un cahier des délibérations et trois listes de membres de la confrérie de St-Joseph pour les périodes 1868-1878, 1894-1909, 1914-1924. Curieusement, après 1899, celui qui avait établi la liste était passé, non à 1900, mais à 2000 !
Joseph BESSON, menuisier, grand-père de Suzon BESSON était sociétaire de la confrérie ST-JOSEPH. Joseph Scipion BESSON était né à Nant le 22.06.1860, fils d’ Auguste BESSON, martinaire, [3]et de Joséphine AUBELEAU. Une généalogie de cette famille BESSON sera mise en ligne dans un prochaine épisode
Il y avait à Nant plusieurs confréries [4] :
- La plus connue était celle des Pénitents Blancs qui possédaient une chapelle pour leur usage, construite en 1684. [5] Cette confrérie avait été créée vers 1600.
- La confrérie de Sainte-Croix, confrérie des maçons, avait été fondée le 3 mai 1644 et les statuts ont été rédigés le 3 mai 1668.
Les statuts de la confrérie de Sainte-Croix ont été trouvés dans les registres de la commune et retranscrits par Antoine Débat, curé de Nant de 1948 à 1964. Il écrit :
« Qu’il nous soit permis à cette occasion de noter que les statuts que nous venons de reproduire n’avaient rien de très original ; ils devaient être une simple transposition des statuts de la confrérie plus ancienne des ouvriers du bois (menuisiers, charpentiers, tonneliers, sabotiers) placée sous le vocable de St-Joseph mais ne disposant pas de chapelle spéciale.
Le texte de ces statuts a disparu mais les menuisiers de Nant conservent encore et se transmettent le cahier des délibérations qui débute en 1644 et sauf une brève interruption de trois années sous la Révolution contient toutes leurs délibérations jusque vers 1914.
Il permet de se rendre compte que leur confrérie fonctionnait exactement comme celle des maçons. Si la confrérie des maçons n’a pas laissé de trace celle des menuisiers se perpétue pratiquement avec la célébration chômée de la fête de St-Joseph, assistance à la messe (en la chapelle à St-Pierre, consacrée à ce saint depuis le concordat), assemblée générale audit jour, cotisation, présence aux obsèques et fourniture de la cire aux enterrements des confrères . »
Chaque 19 mars [6], les membres de la confrérie se réunissaient et nommaient pour l’année, un « ouvrier », responsable de la provision de cire ou de cierges et de la caisse.
Le cahier indique la somme d’argent en caisse et la quantité de cire ou de cierges en possession de la confrérie.
En plus de leur cotisation, les confrères payaient
- quand ils se mariaient,
- quand ils « levaient boutique »,
- quand ils avaient un apprenti,
- et une amende s’ils avaient travaillé le jour de la St-Joseph.
A partir de 1823, un sociétaire est chargé de la caisse, une clé est remise à un autre et une seconde clé à un troisième. En 1868, ils se sont cotisés pour acheter un drap mortuaire.
Le cahier de délibérations commence ainsi :
- L’an mil six cent quarante six et le dix huit jour du mois de mars ledit Pierre Lapierre Me Menusier comme estant en charge d’ouvrier a baillé comme est porté par lesdits statuts et ayant reçu une livre cire de Gailhard Vernede, plus une autre livre de Mr François Creyssac plus une autre livre cire de Nicolas Sabde c’est pour tous ceux qui ont levé boutique, plus ayant reçu de Me Jacques Combes une demi livre de cire pour être ouvrier, plus une livre de cire de Jean Lapierre et c’est pour des arriérages.
- Le 19 mars 1700 Jean Picard menusier de la ville de Nant s’est chargé de la quantité de quarante deux livres cire appartenant à la confrérie de St-Joseph et compris la caisse où sont tenus les cierges de ladite confrérie.
Le 29 mars 1704 on lit pour la première fois menuisier . [7]
- Ce jourd’hui 19 mars 1717 Jean Bonnet confesse payer une demi livre cire en présence de Jean André pour avoir travaillé le jour de la fête de St-Joseph.
Sur le cahier de délibérations, il n’y a plus rien à partir de 1792. Il reprend en 1797.
- Ce jourd’hui 20 mars 1797 il est sorti de charge Fulcrand Vigourous charron et a chargé Pol Deveze maître menuisier avec toutes ses appartenances trois livres et quinze sous argent de plus Pol Deveze a payé deux livres savoir une pour avoir levé boutique et une pour s’être marié…
- Ce jourd’hui 19 mars 1808 a été tenu tout le corps ensemble des menuisiers qui fait savoir que dorénavant l’ouvrier est chargé de faire faire le pain béni et distribuera le pain béni à chaque messe dans l’église et avons décidé que quiconque refusera le paiement qui est fixé à sept sous chaque et quiconque refusera le paiement sera privé de tous les services de la caisse et il paiera le jour de la fête.
Est sorti de charge Pol Devèze et avons mis à la place Guillaume Canaguier et l’avons chargé de la caisse avec toutes ses attenances pesant vingt sept livres (cire) et quinze francs argent.
C’est la première fois que des francs sont mentionnés. En effet, le franc, vieille unité monétaire née en 1360, ressurgit à la faveur de la Révolution par la loi du 15 août 1795, en remplacement de la livre tournois et de ses divisions, le sou et le denier de l’Ancien Régime.
- Aujourd’hui 19 mars 1836. Etant réunis tous ensemble avons délibéré ce qui suit : Comme d’usage avons sorti de charge les sieurs Malzac menuisier, Gervais Dur sabotier et Frédéric Debailles menuisier que nous avons acquittés de ce qu’ils étaient chargés.
Avons mis en charge pour la caisse les sieurs Philippe Réfrégies menuisier, Eugène Randon sabotier et Lubac aussi sabotier, leur obligation est d’avertir toute la société :
1° à la mort d’un membre ou d’un de ses enfants pour assister à leur enterrement avec les cierges allumés.
2° et à la fête de St-Joseph que nous célébrons tous les ans ayant le soin de commander la Sainte Messe pour le jour de la fête et une messe des Morts pour le lendemain pour les confrères décédés.
3° les sus nommés nous rendront à leur sortie six cierges demi-livre et seize d’un quart de livre, neufs et vingt-deux vieux, dix francs nonante cinq centimes.
Devèze a payé pour l’apprenti Francis Peyre, Philippe Réfrégies a payé pour s’être marié et Cournet doit le droit d’un apprenti, Galtier doit pour son neveu idem.
Et avons reçu Jacques Boyer marchand de bois et Devèze Jean aussi marchand de bois.
Ils étaient dix-huit sociétaires en 1868, trois sabotiers, un scieur de long, un tonnelier, tous les autres menuisiers.
Une liste des sociétaires [8] de la confrérie Saint-Joseph indique :
- 7 sociétaires en 1914 et 1915,
- aucun entre 1916 et 1919,
- 8 en 1919,
- Ils étaient huit en 1923, un sabotier, un sculpteur, les autres menuisiers.
- 3 en 1924 : Jules Maurel et Etienne Louyriac, menuisiers et Benjamin Gineste [9]., sculpteur, aucun ensuite.