par Jean DELMAS, Suzanne BARTHE
Nous vous proposons aujourd’hui un long contrat de constitution de dot rédigé lors du mariage de Raymond Cauzac et de Clara Malhaga (de Malhac) par le notaire Imbert Mercier en janvier 1471(n.st.). Ce brave notaire devait être payé à la ligne ! Un grande partie du feuillet 172 nous raconte la création de l’homme et de la femme, d’après la Genèse !
Nous avons noté la présence d’une feuille volante qui n’est pas sans intérêt, portant une ébauche de ce contrat. Cette page est rédigée en langue d’oc et semble avoir été écrite par les deux parties, Jacme ou Jacques de Malhac, de Nant, et Raymond Causac, de Millau. Nous en avons pour preuves deux mots personnels ( "mon frère Johan C." et "pour nous"), qui leur ont échappé et que le notaire n’aurait pas employés.
Le mouton d’or, monnaie d’or française, fut créée par Louis IX (St Louis) par ordonnance promulguée le 24 novembre 1226, qui qualifie cette monnaie d’« aignelz à la grosse layne d’or ».
Appartenant à la numismatique médiévale, les premiers spécimens connus ont été frappés à partir du 26 janvier 1311 sous le roi Philippe le Bel, lorsque celui-ci décide de rétablir la monnaie en revenant au monnayage or après avoir supprimé l’ordre des Templiers (1307) ; il avait alors mis la main sur leurs créances (près de 1 million de livres tournois). Cette mesure de reprise en main des finances du royaume a été vue comme le début de la prospérité de son règne.
L’avers de la pièce représente l’agneau pascal, d’où son nom ; cet agneau regarde vers une croix tréflée portant bannière. Le revers est constitué d’une croix gothique.
Les derniers agnels furent frappés à l’époque de Charles VII dont le règne se termine au milieu du XVe siècle.
Dans le cas qui nous concerne, nous voyons que la dot de Claire comprend 500 moutons d’or, ce qui correspond à une "jolie somme" !
En conséquence du contrat de mariage de Raymond Causac, marchand de Millau, et de noble Clara de Malhac (Malhaga), fille de noble Jacques (Jacobus, Jacme) de Malhac, de la ville de Nant , [1] constitution de la dot de Clara (24 janvier 1471, n. st.)
AD Aveyron 3 E 11906 (Imbert Mercier, notaire de Millau), fol. 172-176, et feuille volante.
[Fol. 172] 24 janvier 1471, n. st.
Comme Dieu tout-puissant, créant toutes choses au début du monde, a, du limon de la terre, formé l’homme à son image…. (Suit, d’après le récit de la Genèse, le rappel de la création d’Adam et Eve et de l’union sacrée du mariage)… Et, comme l’écrit l’Apôtre : viri, diligete uxores vestras sicut Christus dilexit Ecclesiam.
Contrat de mariage par paroles du futur entre discret homme Raymond Causac, marchand, fils de Johan Causac marchand et d’honnête femme Aurable de Ulmeris, mariés, de Millau, diocèse de Rodez, et noble Clara Malhaga, [Fol. 172 vo] fille de noble Jacques de Malhac, de la ville de Nant, diocèse de Vabres. Conformément à la coutume, il est d’usage de constituer une dot aux épouses pour supporter les charges du mariage.
Au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit, Amen. Sachent tous que ledit noble Jacques de Malhac veut suivre les traces des vieux pères (volens sequi vestigia veterum patrum) et établir en mariage sa fille, noble Clara, avec ledit Raymond Causac. Il rappelle le précédent contrat de mariage de celle-ci avec noble Guilhem Teysseyre, décédé depuis, du lieu d’Olharges [2], qui a fait l’objet d’un acte public reçu par Me Guilhem Cabironis, notaire de Nant, sous sa date.
[Fol. 173] Il constitue à sa fille, bien qu’elle soit absente, au titre de sa dot et verqueria, pour elle et ses héritiers, la somme de cinq cents moutons d’or ou leur équivalent.
– item, pour ses vêtements nuptiaux une robe (una raupa sive oppellanda) de drap de bonne qualité et sans mélange, la canne valant 5 écus d’or ;
– item, une gonelle de drap de bonne qualité et sans mélange, la canne valant 3 écus d’or ;
– item, tous les vêtements, bijoux et bagues que ledit Jacobus de Malhac lui avait constitués, lors de son mariage avec noble Guilhem Teysseyre, son premier mari.
Ledit Jacques de Malhac a promis payer aux futurs époux, à savoir au moment de la célébration du mariage (ante annulum) 100 moutons d’or ou leur équivalent, cela en déduction des 500 moutons d’or. ; et de lui remettre una oppellanda, una gonela, ainsi que lesdits vêtements, bijoux et bagues promis naguère au premier mari de ladite Clara, payables dans l’année et 10 moutons d’or ou leur équivalent, chaque année, à la date (anniversaire) de la célébration du présent mariage.
[Fol. 173 vo] Telle est la teneur du pacte conclu entre noble Jacques de Malhac et Raymond Causac, futur époux de ladite Clara.
[Fol. 173 vo à 175 vo] Suivent les conditions diverses et les garanties des paiements : interdiction d’accumuler les paiements, éventualité d’un retard, obligation pour Clara de faire quittance à son père de ce qu’elle recevra, mention de la lex Falcidia, [3] dite aussi quarte trébellianique, etc.
[Fol. 176] Fait à Millau, dans la cour de la maison d’habitation de noble et honorable homme Maître Johan Galhard (Galhardi), maître en médecine, seigneur de Ulmeris.
Présents :
– noble Me Johan Galhard,
– noble et religieux homme dom Hugues de Albanhaco, prieur de Coppa-Ros,
– nobles hommes Johan de Monte-Alto [4], du bourg de Compeyre, seigneur de Monte-Alto,
– Arnaud Causac, de la ville de Saint-Affrique, seigneur de Boussac,
– honorables hommes Johan de Ulmeris,
– Raymond Barrerie, marchands de Millau,
– Guilhem de Vessodis, du bourg de Compeyre.
Et moi Ymbert Mercier, bachelier ès lois de Millau, notaire royal.
Pièce jointe sur feuille volante [5]
Projet de contra entre noble Jacques (Jacobus, Jacme) de Malhac, de Nant, et Johan Causac, marchand de Millau, pour la dot de noble Clara de Malhac (Malhaga), dite Clareta, fille du premier et future belle-fille du second (24 janvier 1471, nouveau style)
AD Aveyron 3 E 11906, feuille volante entre fol. 172 et 173
[ligne 1] Jésus-Ave Maria
Suivent les pactes et conventions entre le sieur de Malhac, de Nant, et le sieur Johan Causac, marchand de Millau :
[ligne 5] Premièrement, le sieur de Malhac « donnera » sa fille Clareta pour épouse à Raymond Causac, lorsqu’il en sera requis par messire Johan Causac ou par ledit Raymond.
Item, ledit sieur de Malhac donne en dot à sa fille 500 moutons d’or, ou l’équivalent, lequel sera payé dans la forme [ligne 10] ou manière qui s’ensuit :
– primo, lors du sacrement (a l’anel), 100 moutons (d’or) et une bonne robe de drap, la canne valant 5 écus et une/gonelle de drap, la canne valant 3 écus ; et tout le reste, comme robes, bijoux et bagues, qu’elle reçut à son premier mariage,/
– item, lors de l’anniversaire des noces, en comptant dix ans (?), et chaque année, [ligne 15] 10 moutons jusqu’à fin de paie, avec engagement que les paiements ne pourront (ou ne devront) être cumulés. Et pour tenir et observer les pactes susdits ledit sieur de Malhac et « mon » frère, le sieur Johan Causac, ont promis et juré de ne point venir contre ceux-ci.
(Garants ?) pour « nous » Johan de Montblanc (? ), [ligne 20] Arnaut Causac et maître Johan Galhart et Johan de Bruneyras (?), comme amis (=alliés) et parents des deux parties.
Ordonnés et prononcés le 22 janvier de l’an 1470 (ancien style), avec pacte que si quelqu’une des parties ne respectait pas les termes et les conventions, la partie [ligne 25] infidèle (?) remettrait à l’autre 25 marcs d’argent. Et cet engagement, les parties l’ont souscrit et signé de leurs propres mains, l’an et le jour susdits.
Jacques de Malhac, c’est ainsi - Causac
Bonne lecture !